À l’occasion du premier anniversaire du colloque international organisé par le Rectorat de l’Université d’État d’Haïti (RUEH) et le Ministère des Affaires Étrangères et des Cultes (MAEC), cet article revient sur les moments marquants de cet événement, qui a mis en lumière l’impact de la Révolution haïtienne sur les luttes d’émancipation à travers le monde.
Un colloque international s’est tenu à l’hôtel Montana, du 14 au 16 novembre 2023, réunissant des experts pour discuter de l’influence d’Haïti dans la lutte contre l’esclavage. Dr Manuel Covo, maître de conférences à l’Université de Californie, a marqué les esprits avec sa présentation sur le rôle central de Saint-Domingue dans les dynamiques commerciales et révolutionnaires du XVIIIe siècle, offrant une perspective inédite sur les ambitions de Toussaint Louverture et l’impact mondial de la révolution haïtienne.
Lors du colloque international sur la contribution d’Haïti à l’émancipation des peuples, qui s’est tenu du 14 au 16 novembre 2023 à l’hôtel Montana à Port-au-Prince, Dr Manuel Covo a captivé l’audience avec une conférence intitulée « L’entrepôt des révolutions : Saint-Domingue, souveraineté commerciale et l’Alliance Franco-Américaine ». Organisé par le Rectorat de l’Université d’État d’Haïti (RUEH) en collaboration avec le Ministère des Affaires étrangères et des Cultes (MAEC), cet événement a rassemblé des historiens et universitaires pour débattre des luttes contre l’esclavage et du rôle central d’Haïti dans ces mouvements historiques.
Dans son intervention, Dr Manuel Covo, maître de conférences à l’Université de Californie Santa Barbara, a mis en lumière l’impact crucial de la révolution de Saint-Domingue sur les dynamiques impérialistes de l’époque. En analysant la politique économique et militaire de la France à l’époque de la rébellion haïtienne, il a expliqué comment cette révolution a bouleversé les équilibres du pouvoir colonial, en particulier en ce qui concerne l’impérialisme français.
Dr Covo a porté une attention particulière aux idéaux de Toussaint Louverture, figure emblématique de la lutte pour l’émancipation des esclaves et de la colonie de Saint-Domingue. Toussaint Louverture, selon le conférencier, n’a pas simplement cherché à abolir l’esclavage, mais à redéfinir les structures sociales et économiques de la colonie. Il voulait transformer les esclaves en travailleurs salariés, donnant ainsi aux anciens esclaves la possibilité de participer activement à l’économie de la colonie, tout en défiant les intérêts des impérialistes.
Le professeur a détaillé comment, au début de la révolution, la politique commerciale de Toussaint Louverture était intimement liée à son projet social plus large, qui visait à mettre fin à l’esclavage. Ce projet était perçu comme une menace directe par les puissances coloniales, en particulier la France. La révolution de Saint-Domingue représentait un défi fondamental non seulement pour les structures esclavagistes, mais aussi pour les systèmes économiques impérialistes en place. Le général Louverture a dû faire face à des pressions énormes, tant sur le plan interne qu’externe, alors qu’il s’efforçait de créer une société fondée sur des principes de liberté et d’autonomie économique.
Dr Covo a également abordé la question de la souveraineté économique de Saint-Domingue à travers ses relations commerciales avec la France et les États-Unis. Il a évoqué une relation triangulaire, marquée par des échanges stratégiques avec ces deux puissances, dans un contexte où la France tentait de maintenir son influence sur la colonie tout en rivalisant avec les États-Unis sur le plan économique. Cette relation complexe a permis à Saint-Domingue, sous la direction de Toussaint Louverture, de jeter les bases d’une autonomie économique durable.
Le conférencier a rappelé que Toussaint Louverture cherchait non seulement à abolir l’esclavage, mais aussi à construire un État économiquement indépendant. Dans cette optique, il a instauré une politique fiscale ambitieuse et pris des mesures économiques importantes, telles que la promulgation de la constitution de 1801, pour garantir l’émancipation des travailleurs de Saint-Domingue. Ce cadre législatif visait à structurer l’économie locale de manière à la rendre moins dépendante des puissances coloniales.
Après l’indépendance, Haïti, héritière de Saint-Domingue, a poursuivi ses relations commerciales avec des pays comme les États-Unis et l’Angleterre. Dr Covo a souligné que ces échanges marquaient le début d’une démocratisation du commerce dans la région, à un moment où les États-Unis et l’Angleterre, parfois alliés, parfois rivaux de la France, voyaient dans ces relations une opportunité stratégique pour affaiblir l’influence française dans les Caraïbes.
Ce colloque, visant à examiner l’héritage de la Révolution haïtienne, a permis aux participants d’explorer les contributions d’Haïti à la lutte contre l’esclavage à travers des discussions riches et variées. Pendant trois jours, historiens, chercheurs et universitaires venus d’horizons divers ont débattu des enjeux liés à l’émancipation des peuples, des dynamiques impérialistes et de l’impact de la Révolution haïtienne sur l’histoire mondiale.