Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) publie, ce vendredi 20 août 2021, son rapport sur l’assassinat du Président de la République, Jovenel Moïse, survenu dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021. Le RNDDH, dans ce rapport de 28 pages, fait une récapitulation des faits qui précèdent ainsi que ceux qui succèdent l’assassinat du Président Jovenel Moïse. Le président a été livré par des responsables de sa sécurité, conclut le RNDDH qui révèle également que le Premier ministre Ariel Henry et l’ancienne juge à la cour de cassation, Wendelle Coq Thélot étaient en contact serré avec Joseph Félix Badio le soir même de l’assassinat.
Selon le RNDDH, les auteurs intellectuels et matériels de ce crime, pour mettre en œuvre leur plan macabre, ont pu compter sur l’appui d’au moins deux (2) des responsables de la sécurité présidentielle, à savoir le commissaire divisionnaire Jean Laguel Civil et le commissaire
municipal Dimitri Hérard, respectivement coordonnateur de la sécurité générale du président et responsable en chef de l’USGPN.
L’inspecteur principal Paul Eddy Amazan et le commissaire de police Pierre Osman Léandre eux-mêmes responsables en chef de l’USP et du Cat Team, n’étaient en fait plus impliqués dans l’organisation de la sécurité de feu Jovenel Moïse, ce dernier ayant décidé d’accorder toute sa confiance à ceux-là mêmes qui l’ont trahi, désorganisant ainsi le travail de l’USP et du Cat Team.
Se basant sur les différents procès-verbaux qui ont été dressés par les magistrats de paix et les dires des personnes arrêtées dans le cadre de cet assassinat, l’organisme de droits humains rapporte que dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, les policiers Bony Grégoire, William Moïse, Elie Jean Charles ainsi que Joseph Félix Badio étaient chargés de récupérer les autres membres du commando qui a assassiné le chef de l’État. Au total, ils étaient au nombre de vingt-huit (28) : les trois (3) policiers susmentionnés, vingt-deux (22) colombiens, deux (2) américains d’origine haïtienne et Joseph Félix Badio. Six (6) véhicules ont été mobilisés pour l’opération.
Vers 1 heure 35 minutes du matin, ces individus, lourdement armés, ont fait irruption dans le périmètre de sécurité de la résidence du président Jovenel Moïse. Aucune alerte n’ayant été lancée, ils ont pu facilement passer le premier rempart de sécurité composé d’agents de CIMO. La barrière principale de la maison avait été laissée ouverte tel que cela avait été prévu. Cependant, en s’y introduisant, les membres du commando ont essuyé quelques coups de feu. Il s’en est suivi des échanges de tirs.
Dès les premiers coups de feu, Jovenel MOÏSE a commencé à passer des appels. Le Directeur Général a.i. de la PNH, Léon Charles, le coordonnateur de la sécurité, le commissaire divisionnaire Jean Laguel CIVIL ainsi que le responsable de l’USGPN le commissaire Dimitri Hérard ont tous été contactés par le Président. Ils lui ont tous promis de lui envoyer des renforts immédiatement.
James SOLAGES muni d’un porte-voix, a invité les agents de la PNH à ne pas tirer et a affirmé qu’il s’agissait d’une opération de la DEA. Quelques agents dont certains se trouvaient à l’intérieur du bâtiment ont quand même continué à tirer, ce qui a porté James Solage à les mettre en garde contre la riposte de la DEA. Cette ruse, selon le RNDDH, a semblé marcher même si par la suite, certains agents interrogés affirmeront qu’ils étaient en fait à court de munitions.
La mission initiale telle que, selon plusieurs personnes rencontrées par le RNDDH, semble avoir été d’arrêter le président Jovenel Moïse sur la base d’un mandat d’arrêt émis en date du 18 février 2019 par le magistrat instructeur Jean Roger Noëlcius, pour des faits d’assassinats perpétrés dans le cadre du massacre de La Saline, survenu les 13 et 14 novembre 2018. Après son arrestation, le président le locataire du Palais National aurait dû être remplacé par Christian Emmanuel Sanon ou par la magistrate Wendell Coq Thélot.
Répartition des taches dans le cadre de ce forfait
La répartition des tâches dans le groupe était ainsi selon l’organisme de de défense des droits humains : Christian Emmanuel Sanon détenu dans le cadre de ce dossier était chargé de la coordination générale du coup qui devait aboutir à son accession au pouvoir ;
Dimitri Hérard, également sous les verrous, était chargé de fournir des armes et des munitions aux membres du commando dont des fusils d’assaut, des bonbonnes de gaz lacrymogène, des grenades et des scies électriques ;
Rodolphe Jaar alias Dodof était chargé de recueillir et de garder le matériel de la mission avant de le distribuer aux membres du commando au moment opportun. En ce sens, au moins quatorze (14) armes à feu, et six (6) véhicules, mobilisés pour la perpétration du crime, ont été recelés chez lui ;
Gilbert Dragon était chargé de fournir à l’équipe des insignes de la DEA ;
L’ancien sénateur de l’Ouest, John Joël Joseph, était chargé de payer au comptant les frais de location des véhicules ;
Jean Laguel Civil incarcéré dans cette affaire était chargé de soudoyer des agents affectés à la sécurité du président en vue de permettre une entrée en douceur du commando dans la résidence de Jovenel Moïse. Il avait en sa possession environ cent mille (100.000) dollars américains ;
Joseph Félix Badio activement recherché par la Police Nationale d’Haïti (PNH) était chargé de recevoir en temps réel des informations relatives aux faits et gestes de la victime. Pour cela, il a loué un appartement en face de la maison du président et était en contact permanent avec Marie Jude Gilbert Dragon, arrêté par la PNH, qui lui fournissait ces informations.
Duberney Giraldo Capador et German Alejandro Riviera Garcia alias colonel Mike, étaient chargés de la reconnaissance des lieux. Pour ce faire, ils se sont rendus, à trois (3) reprises au sommet de la montagne qui surplombe la maison du président ;
Selon les informations recueillies par cette institution, la mission a été financée en grande partie par Walter Venteinilla, un ressortissant étranger à qui promesse avait été faite de lui donner les coudées franches en vue d’implémenter dans le pays une compagnie d’électricité. Il est actuellement à la tête de la Worldwide Capital Lending Group. Il est aussi présenté comme étant un des responsables de la Counter Terrorist Unit (CTU).
Le jour de la mission, des membres du commando, devaient se poster à l’extérieur et seulement quelques membres influents dudit commando dont German Alejandro Riviera Garcia alias Mike avaient la charge de s’introduire dans les locaux et d’appréhender Jovenel Moïse.
Le RNDDH souligne que l’inspecteur divisionnaire Jude Laurent, agent de l’USP, affecté à la sécurité de la résidence présidentielle était, par le passé, attaché à la sécurité rapprochée de Marie Jude Gilbert Dragon quand il était commissaire de police. Ainsi, ils ont gardé des liens étroits et, c’est à l’inspecteur divisionnaire Jude Laurent qu’il revenait d’informer en temps réel, Marie Jude Gilbert Dragon qui lui-même, relayait l’information à Joseph Félix Badio.
De plus, le RNDDH signale que, Joseph Félix Badio, dont le téléphone émettait aux environs de la maison du chef de l’État, était en contact serré avec plusieurs personnalités. Par exemple, le soir-même de l’assassinat, le premier ministre Ariel Henry s’est entretenu par téléphone tant avec Joseph Félix Badio qu’avec le Président Jovenel Moïse. La magistrate Wendell Coq Thélot s’est aussi entretenue avec Badio.
A rappeler que 44 personnes ont été arrêtées dans le cadre de l’enquête autour de l’assassinat du Président Jovenel Moïse. Aussi, une dizaine d’autres sont activement recherchées par la Police Nationale d’Haïti, notamment Me Wendelle Coq Thélot, John Joël Joseph et Joseph Félix Badio.
Le 9 août 2021, le juge d’instruction Mathieu Chanlatte a été désigné par le doyen près le Tribunal de première instance de Port-au-Prince, Bernard Saint-vil pour instruire l’affaire. Ce Magistrat, après la mort tragique de son Greffier Ernst Lafortune, s’est déporté du dossier pour ‹‹ convenance personnelle ››.
Shelovenie Jean