Dans un rapport acheminé au Coordonnateur de la Sécurité présidentielle, Commissaire Divisionnaire Jean Laguel Civil, le 10 juillet dernier, le chef de l’Unité de Sécurité Générale du Palais National (USGPN), Dimitri Hérard, retrace l’évènement du 7 juillet 2021 qui a coûté la vie au Président de la République, Jovenel Moïse. Dimitri Hérard raconte sa version des faits.
Selon le chef de l’USGPN, le 7 juillet 2021, le Président Jovenel Moïse a informé le Commissaire Jean Laguel Civil, qu’il a entendu des détonations dans les parages de sa résidence, à Pèlerin 5. A une (1) heure 35 AM, Civil a appelé Dimitri Hérard et lui a ordonné d’envoyer du renfort en urgence dans la zone. Dans l’immédiat, dit Dimitri Herard, j’ai tenté d’appeler le chef des opérations de l’USGPN, l’Inspecteur Divisionnaire Jacques Sincère qui était injoignable au téléphone.
A 1 heure 39, soit 4 minutes plus tard, Herard affirme avoir reçu un autre appel, c’était celui du Président Moïse qui lui a dit ‹‹ je suis en difficulté et j’ai besoin d’aide immédiatement ››. De là, Hérard dit avoir appelé son chauffeur, l’agent I, Jean Richardson Sélius, pour se rendre, tous deux, chez le Président. N’ayant pu trouver Jacques Sincère, dit Herard, j’ai instruit mon assistant, Ronel Chéry, d’envoyer en urgence le maximum de renfort en la résidence présidentielle.
En route pour Pèlerin 5, Herard a reçu à 1 heure 46 minutes, un appel d’un inspecteur de la sécurité présidentielle (USP) communément appelé ‹‹ Gros Moïse ›› qui lui a informé de la situation qui se développe à côté de la résidence du chef de l’État, ‹‹ je suis en route ›› a-t-il répondu. Ensuite, à l’approche de l’entrée de Pèlerin 3, il a communiqué une nouvelle fois avec Civil, à qui il a donné un rapport verbal de sa position.
Suivant ce rapport, à l’entrée de Pèlerin 3, un Pick-up de couleur blanche du commissariat de Pétion-Ville était de travers sur la route, des agents de police administrative en position d’abris au sol, pointant vers l’entrée de Pèlerin 3. A Dimitri Herard, ces agents de police ont expliqué qu’ils étaient en route pour chez le Président Jovenel Moïse suite à l’alerte donné. Ayant remarqué une Toyota Prado de couleur beige paraissant suspecte à l’entrée de Pèlerin 3, ils se sont arrêtés pour vérification. A l’intérieur de ce véhicule, il y a quatre (4) personnes qui ont pris la fuite à la vue des policiers, selon ce qu’ils ont raconté à Herard.
‹‹ Ceci m’ayant ralenti, l’Inspecteur Général Vladimir Paraison accompagné d’autres personnes me rejoint, s’identifient également aux policiers, nous reprenons la route pour la résidence du Président. Mon chauffeur et moi, dans mon véhicule Toyota Land Cruiser grise immatriculé DM-01108 et Paraison dans son véhicule Chevrolet Tao de couleur noire ››, rapporte Dimitri Herard.
Arrivés à environ 30 mètres du poste de CIMO se trouvant à l’entrée de l’impasse où se situe la résidence du Président, plusieurs hommes habillés en noir avec des bottes jaunes et lourdement armés ont intimé l’ordre de reculer, raconte Dimitri Herard. Simultanément, une voix masculine n’arrêtait pas de répéter avec un porte-voix ‹‹This is a DEA operation ›› ‹‹sa a se operasyon DEA ›› ‹‹ nou pa bezwen panike ››.
‹‹ Étant inférieurs en nombre, ne connaissant pas leur magnitude, étant conscient de la possibilité que le Président soit avec eux et, le cas échéant, ne voulant pas mettre sa vie en danger, nous nous sommes engagés à faire marche arrière ››, explique Dimitri Herard.
A ce moment là, arrivèrent deux (2) pick-up de l’USGPN, auxquels, Hérard dit avoir ordonné un repli tactique jusqu’à l’entrée de Pèlerin 5, le temps de réorganiser sa défense.
Alors qu’ils faisaient marche arrière, les hommes en noir avançaient vers eux, la plupart déployés au sol. Entre temps, Dimitri Hérard affirme avoir essayé sans arrêt d’appeler le chef de l’État et d’autres personnes se trouvant dans la résidence. ‹‹ Personne n’a répondu ››, a-t-il rapporté. Peu de temps après, l’inspecteur Bastien Corad explique qu’il ne pouvait pas répondre car il était maîtrisé par les mercenaires.
A 2 heures, Hérard affirme avoir reçu à nouveau l’appel de Civil qui lui a demandé un rapport de la situation, alors qu’il est en route. Herard lui a dressé le tableau de la situation. ‹‹ Bloque le passage ››, réagit Civil, le coordonnateur de la sécurité présidentielle. Dès lors, la troupe d’Hérard s’est repliée et décide de se mettre au niveau de l’hôtel Kinam et poster au pied de la route de Kenscoff deux (2) Pick-up de L’USGPN pour empêcher aux assaillants de s’enfuir.
Pour en savoir plus sur eux, Herard affirme avoir dépêché 3 agents de l’USGPN, malheureusement ces agents ont tous été kidnappés par les assaillants. Ce sont : l’agent I Toussaint Dulcé, Mérise Georges Wickef et Fabre Jameson, tous deux agents II.
Entre temps, le Directeur Général de la Police Nationale d’Haïti, Léon Charles, le Directeur Central de la Police Judiciaire (DCPJ), Frédéric Leconte, et celui de la Police administrative arrivent sur les lieux. Devant le commissariat de Pétion-Ville, ils assurent les commandes de la situation.
‹‹ Ce n’est que vers 3 heures et quelques minutes, ayant appris la nouvelle de la mort du Président et la blessure de la Première Dame par Léon Charles, que je fus certain que les assaillants n’avaient pas le Président en main ››, a affirmé Dimitri Herard.
À l’instant, selon le commandant de l’USGPN, commencèrent les planifications et préparatifs avec les autres corps de la PNH pour l’assaut qui a eu lieu vers 2 heures et qui a mené à l’arrestation de deux (2) haïtiens-américains, la mort de trois (3) colombiens et la libération des trois (3) otages. Ce sont les otages libérés qui ont informé à la Police que les assaillants ont été au nombre de 28.
À l’aide des barrages érigés, les mercenaires n’ont pas pu bouger de leur position, et le lendemain, soit 8 juillet, 11 d’entre eux ont été appréhendés à l’Ambassade de Taïwan, conclut le rapport écrit par Dimitri Hérard, placé en isolement par l’inspection Générale de la PNH dans le cadre de l’enquête autour de l’assassinat du chef de l’État.
Shelovenie Jean