Nous publions ci-après une note du Collectif Défenseurs Plus, à travers laquelle l’organisme de défense des droits humains crie au scandale contre une tendance qui consiste à instrumentaliser la Police nationale d’Haïti (PNH) à des fins politiques. Il invite les autorités policières, plus précisément l’Inspection Générale de ladite institution à prendre, sans délai, les décisions qui s’imposent afin de sanctionner les agents ayant commis des actes répressifs à l’encontre des manifestants et des journalistes.
Le Collectif Défenseurs Plus, organisme de promotion et de défense des droits de la personne humaine, constate avec regret la recrudescence des actes répressifs commis par les agents de la PNH, dans plusieurs zones géographiques du pays. Depuis la reprise des mobilisations anti-gouvernementales et des mouvements de protestation contre l’insécurité, on ne cesse d’enregistrer des cas de brutalités policières à l’encontre des militants politiques, des simples citoyens et même des journalistes. Ces comportements portant atteinte aux libertés publiques vont à l’encontre de la dynamique démocratique que prône la Constitution haïtienne de 1987.
La loi cadre du 28 décembre 1994, portant organisation et fonctionnement de la Police Nationale d’Haïti fait de cette entité le garant de l’ordre public assurant la protection et le respect des libertés des personnes, des vies et des biens. Or, les faits qui se sont produits ces derniers temps montrent que la PNH tend de plus en plus à s’écarter de sa véritable mission. On assiste à une volonté quasi-systématique des agents de l’ordre pour réprimer les mouvements de protestation pacifiques organisés par des acteurs de la société civile et des acteurs politiques dans plusieurs villes du pays (Port-au-Prince, Arcahaie, Ouanaminthe…). Les droits de réunion, d’association sont reconnus et ne peuvent faire l’objet que des seules restrictions prévues par loi, dans le souci de garantir l’ordre public, les libertés et les droits d’autrui… selon ce qui est inscrit dans le pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Des voix s’élèvent pour dénoncer le fait que des journalistes soient la proie des violences policières alors même qu’ils sont dans l’exercice de leur fonction. Citons en exemple, le cas des deux journalistes-blogueurs Alvales Destiné et Jeanril Méus, qui ont été blessés par balle le lundi 9 février 2021 au moment où des agents de la PNH et des soldats des Forces Armées d’Haïti tentaient de disperser des manifestants au Champ de Mars à coup de gaz lacrymogène et de projectiles ; ceux de Dieu-Nalio Chéry et Johnny Fils-Aimé qui ont été attaqués par des policiers en marge d’une manifestation estudiantine. Des agents du Corps d’intervention de Maintien d’Ordre (CIMO) ont délibérément bombardé un véhicule de la Radio-télévision Pacific de gaz lacrymogène qui avait à son bord un groupe de journalistes de plusieurs médias.
Le 14 février 2021, au cours de la marche organisée par certains acteurs de la société civile, les journalistes Fegens Canéus Paul (de la Radio capitale FM) et Jephté Valery Basile (du média en ligne « Machann zen Haïti ») ont été touchés par des balles de caoutchouc tirées par des agents de l’ordre. Aucune raison ne saurait justifier ces actes regrettables qui portent atteinte à la liberté de la presse et au droit à l’information.
Le Défenseurs Plus dénonce fermement cette tendance consistant à instrumentaliser l’institution policière à des fins politiques. Ce qui ne fait que fragiliser la démocratie haïtienne et piétiner les droits fondamentaux acquis par le peuple haïtien sur fond de luttes et de résistances acharnées. Il invite les autorités de la PNH, plus précisément l’Inspection Générale, à prendre, sans délai les décisions qui s’imposent afin de sanctionner les agents ayant commis des exactions.
Enfin, il tient à rappeler que la Police, en tant qu’auxiliaire de la justice et des pouvoirs publics, se doit d’agir dans les limites fixées par la loi tout en faisant un usage mesuré et proportionné de la force publique afin d’éviter les cas de violations de droits des citoyens en cette période de crise politique. Il recommande au Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN) de faire obligation à tous les policier-es de porter leur numéro d’identification et de respecter scrupuleusement les prescrits de la loi dans le cadre de leur travail.