Après la circulation d’une copie d’un chèque d’un million de gourdes au profit d’un sénateur sur les réseaux sociaux, la polémique enfle autour de l’attribution de ces fonds appelée ironiquement « kòb pwason ». Suite au tollé occasionné, des citoyens voient dans l’octroi de cette subvention une pratique malsaine. Mais, s’agit-il d’une réalité nouvelle ? À qui les parlementaires vont rendre compte ? Ces pratiques sont-elles opportunes à un moment où l’on parle, à grand renfort de publicité, d’austérité ?
Les millions de pâques : coutume ou nouveauté ?
Un montant oscille entre 900 et 950 millions de gourdes est alloué au grand corps. Selon le sénateur Latortue, en raison du dysfonctionnent du parlement sous Martelly : « ce budget est reconduit depuis plusieurs années ». Autrement dit, la pratique de « subvention » en période pascale n’est pas nouvelle. D’ailleurs, c’est aussi le cas lors des grandes vacances, de la rentrée des classes et des fêtes de fin d’année. À ce propos, tout sénateur ne manquera pas de vous dire que « c’est prévu dans le budget », comme pour vous signifier la légalité de cet acte.
De plus, à en croire le président du Sénat, on est encore loin d’en finir. Youri Latortue distribue le million pascal Ce dernier, étant un parlementaire d’expérience, sait forcément de quoi il parle. Rappelons seulement que c’est le parlement qui vote le budget. Donc, s’octroyer des crédits, même injustifiés, est une simple formalité. Sauf que, à la lumière de ces faits, on comprend vite que le budget permet aux décideurs de naviguer à vue dans l’opulence, malgré déjà bien protégés tant du côté salaire que celui des frais inhérents à leur fonction, tout ceci au frais du contribuable qui a tant de mal à recevoir des services pour lesquelles ses taxes sont collectées à cœur joie.
Quels mécanismes de contrôle : jugements des pairs ou CSC/CA ?
Il importe de se questionner sur .la dilapidation qui peut s’en suivre, lorsqu’on sait que les parlementaires ne sont pas comptables de deniers publics. C’est une question épineuse que de demander à certains élus comment ils vont pouvoir rendre compte sur cette subvention. Et les propos grossiers du sénateur Sénat l’en témoignent.
Toutefois, pour certains, ils ne voient pas d’inconvénient à se soumettre au jugement de la cour des comptes tandis que les autres, plus malicieux, se cachent derrière le règlement interne du Senat, arguant que l’institution de contrôle du Senat est encore l’assemblée des sénateurs. Dès lors, on est en plein dans la logique de juge et parti et la porte s’ouvre à toutes formes de combines.
Une réalité socioéconomique catastrophique
Le cyclone Matthew est venu empirer la situation socioéconomique du pays alors que les indicateurs étaient déjà au rouge. Depuis la montée du président Moise, on ne cesse de parler d’austérité. On a même prévu une hausse substantielle du prix de l’essence. Or, avec ces types de subvention, les autorités nagent à contre-courant des mesures annoncées. En effet, au lieu de l’austérité, ces comportements font montre d’une opulence démesurée. Bref : austérité pour le peuple, opulence pour les gouvernants.
À un moment où des victimes de Matthew habitent dans les grottes, comme au temps de l’homme des cavernes, ces pratiques à même de désintéresser les citoyens aux questions politiques et, par la, de percevoir, les responsables politiques comme des corrompus, des dilapidateurs du fond public. Néanmoins, la population attend des actes à même d’améliorer son quotidien. Pourtant, au plus haut niveau de l’Etat, les actes contre-productifs n’en finissent pas.