Après la démission, sous fond de dénonciation, de Marie Yolène Gilles, le Réseau National de Défense des Droits Humains s’est finalement prononcé à travers un texte intitulé : «Soupçons et Allégations : le RNDDH se positionne !!!». À travers ce document, l’institution dit présenter ses excuses pour ce spectacle accablant mais se défend sur les accusations de corruption portées par son ancienne assistante responsable de programme…
Depuis environ un mois, les rumeurs persistantes qui faisaient croire que le RNDDH, par l’entremise de son Directeur Exécutif, a empoché la coquette somme de 1,5 million de gourdes se sont révélées fondées. En effet, dans la lettre adressée à Pierre Esperance, Marie Yolène Gilles dit rendre son tablier pour ne pas s’engouffrer dans la spirale de corruption. « Je ne peux patauger dans la corruption » : Marie Yolene Gilles quitte le RNDDH
Depuis, les révélations sont incessantes. Outre ce montant, l’organisation a aussi reçu des subventions de l’ONA, de l’APN et des avantages d’autres entreprises de la place, notamment la Digicel. Pourtant, selon Marie Yolène Gilles, cette pratique est contraire à la charte de l’organisation. Et plus d’une fois, l’on a entendu Pierre Esperance dire, que le RNDDH trouve son financement en dehors d’Haïti. Tout compte fait, un chèque est venu tout dévoiler.
Le déni : Pierre Esperance a-t-il voulu garder son secret
Un laps de temps s’est écoulé avant que Pierre Esperance n’admette avoir reçu le chèque en question, mais ce n’est encore là le drame. Là où le spectacle est plus désolant, c’est lorsque celui-ci atteint le cap du déni. Pour rappel, plus d’une fois Marie Yolène Gilles a informé que le Directeur Exécutif a adressé une correspondance au BMPAD, arguant qu’il n’était pas au courant de pareille transaction.
Dans la note du RNDDH, aucun démenti n’a été apporté. Ainsi donc, ne serait-ce que sur ce point précis, Mme Gilles disait vrai. De plus, selon cette dernière, Pierre Esperance avait même avoué que l’Administratrice s’est servie du sceau de l’institution à son insu. Et d’ailleurs, c’est à ce titre qu’il a écrit le BMPAD pour soi-disant s’enquérir sur le chèque en circulation. Fait étrange, aucun membre de l’équipe n’a été sanctionné. Là, tel un jeu de dupe, le mensonge semble être à son comble.
À ce propos, n’est-il pas censé de dire que probablement, Marie Yolène Gilles était une empêcheuse de tourner en rond; car depuis sa démission, les autres membres de cette structure, en dépit de ce scandale, affichent une harmonie parfaite. Fait étonnant, pourquoi ce n’est que maintenant que le RNDDH veut informer le peuple ? Pourquoi aussi, c’est Mme Gilles qui claque la porte alors qu’elle dit se refuser à supporter l’inacceptable ? Au fond, comment M. Esperance peut-il se dédire en si peu de temps sans faire l’objet d’aucune sanction, ne serait-ce que sur le plan moral ?
Le chèque : entre piège et perfidie
Ils sont nombreux à penser que l’octroi de cette subvention était un piège tendu par celui qui était ministre de l’intérieur sous l’administration d’Aristide. Jocelerme Privert, a été englué voire éclipsé dans le rapport de 2004 du NCHR, nouvellement RNDDH, sur le « massacre » de la Scierie. En outre, dans le rapport de 2009 de RNDDH ; l’institution envisageait pour le Sénat le risque de devenir un « repère de bandits » en indexant plusieurs candidats au Sénat dont Jocelerme Privert.
Durant le mandat de Privert, plusieurs commentateurs questionnaient le comportement du RNDDH face à ce pouvoir. Pour certains, l’institution était devenue moins tranchante ou même partisane. Ainsi, à la lumière des derniers événements, on ne peut pas s’empêcher de penser à la nonchalance de l’organisation vis-à-vis de l’administration Privert ni de se rappeler les dénonciations, à bon droit d’ailleurs, des dérives inacceptables sous l’administration Martelly.
Eu égard au déroulé des événements, il n’est pas interdit de penser à l’illustre petite phrase de Privert, désormais célèbre : « est-ce que ça dérange ? », si on veut croire un proverbe de chez nous « Kou pou kou, Bondye ri ». Par la confirmation de ces faits, il importe d’admettre que, côté moralité, le RNDDH a du plomb dans l’aile. En définitive, cette souillure vient compromettre presqu’irrémédiablement la crédibilité de cette institution; sauf à se laver la face devant la nation haitienne. Car le RNDDH vient de rectifier, mais sans convaincre.
Jean Chadly AUGUSTAVE
Photo : Apr